Une étude des réseaux sociaux numériques dans les syndicats français montre en première analyse un écart important entre des confédérations, qui sont en général au mieux hésitantes et, au pire, indifférentes à leur usage, et des instances locales (unions départementales ou syndicats d’entreprise), pour lesquels on remarque des usages foisonnants et très divers, mais sans homogénéité. Pour comprendre cette différence, il faut étudier les ressources organisationnelles mobilisées pour permettre l’activité sur les réseaux et les aptitudes, les savoir-faire et les dispositions activés par les acteurs, mais aussi les ressources narratives que ces outils produisent. À partir d’une enquête par entretiens auprès de permanents confédéraux et de militants syndicaux locaux, nous montrons que la fragilité de leur usage au niveau confédéral est due à des rapports complexes à l’expertise et à la spécialisation professionnelle, qui conduisent à des formes d’activité prudentes. Au niveau local, les usages peuvent être plus nombreux et plus libres, s’appuyant sur des savoir-faire militants plus classiques.