Le droit social à l'épreuve du Covid-19 (dossier).
Droit social numéro 7-8, 07/2020, p. 576-626
Quelle leçon retiendra-t-on de la crise sanitaire quant au sort de ces travailleurs de seconde ligne (éboueurs, hôtes de caisse, chauffeurs routiers, manutentionnaires, ...) au salaire si bas et à la reconnaissance si faible ? Ceux qui ont bénéficié de leurs services l'ont répété à de multiples reprises : la société n'a tenu que grâce à ces travailleurs invisibles et devenus, en temps de tourmente, si remarqués (Patrice Adam).
Pour faire face à l'épidémie, le gouvernement a adapté plusieurs domaines du droit du travail afin d'amortir les conséquences du confinement et de l'inactivité qui en résulte pour certaines entreprises et de permettre, au contraire à d'autres de poursuivre leur activité dans ce contexte exceptionnel. Cette adaptation risque de se muer dans une certaine mesure en menace pour les droits des salariés à qui l'on demande un effort (Yann Leroy). Les hommes aspirent à vivre libres et en sécurité. Mais ces désirs, qui s'appuient l'un sur l'autre, sont aussi en perpétuelle tension. L'un est toujours facteur de déstabilisation de l'autre. La crise sanitaire en offre un dramatique terrain d'expérimentation (Patrice Adam). La période exacerbe les inégalités au travail, entre ceux qui sont exposés au risque sanitaire et ceux qui en sont protégés, ceux qui seront en première ligne de la crise économique et ceux qui seront plus à l'abri. Le droit de la non-discrimination et de l'égalité de traitement son peu mobilisables dans une situation où les inégalités sont d'origine systémique (Marie Peyronnet). Autre forme d'inégalité entre ceux dont l'activité peut se faire sans risque en télétravail et ceux tenus de se rendre dans l'entreprise pour y accomplir leur obligations professionnelles. Ces salariés en première ligne peuvent-ils exercer leur droit de retrait au seul motif de la situation pandémique ? Et sinon à quelle condition cette prérogative peut-elle être mobilisée par les travailleurs inquiets pour leur santé et celle de leur famille ? (Guillaume Champenois). Le droit du travail a consacré dans de nombreuses dispositions le rôle exonératoire, voire extinctif, de la force majeure. Le recours au télétravail et l'assouplissement du régime de l'activité partielle devraient toutefois limiter l'impact sur les contrats de la crise actuelle. (Christophe Radé). La crise plonge le pays dans une crise économique sans précédent. L'activité partielle déployée largement a protégé les entreprises temporairement mais le spectre des réductions d'effectifs plane sur les entreprises et leurs salariés. Des problèmes se posent à l'égard des motifs et de la procédure de licenciement pour motif économique (Julien Icard). La crise du Covid-19 accentue la représentation du télétravail comme projet organisationnel de l'entreprise, l'inscrivant pleinement dans le champ de l'employeur (Benoît Géniaut). Les modifications récentes apportées au dispositif d'activité partielle en temps de Covid-19, témoignent d'un changement de logique de la part du législateur (Raphaël Dalmasso). Le renforcement temporaire du droit du temps de travail des salariés et les règles mises en place, ont été pensées comme une outil de gestion de crise économique (Timothée Khan Dit Cohen). La crise sanitaire impose aux entreprises d'élaborer un plan de continuité de l'activité (PCA). Celui-ci doit s'attacher à déterminer les conditions de reprise de l'activité et les mesures sanitaires à mettre en oeuvre avec l'appui des partenaires sociaux pour protéger la santé et la sécurité des salariés (Elodie Pastor, Séverine Artieres).
https://www.dalloz-revues.fr/Droit_social-cover-90176.htm