DE ROBIEN, Gilles, CHAMARD, Jean-Yves. L'aménagement du temps de travail. Tome 1.
Assemblée nationale, 1994, 225 pages
Aux termes de ses travaux, la Mission est parvenue à un assez fort consensus pour estimer qu’il convient de s’engager plus hardiment vers un aménagement du temps de travail, tout en écartant, en l’état actuel de la société française, une mesure de portée générale et obligatoire qui risquerait d’être rejetée par les français. Le rapporteur préconise un engagement volontariste respectant cinq conditions :
- Toute réduction du temps de travail doit être acceptée par (le(s) salarié(s) concerné(s);
- Il ne doit y avoir aucune augmentation des coûts de production unitaires;
- Les capacités de production doivent être maintenues ou augmentées;
- Le niveau global de la consommation des ménages doit être impérativement maintenu;
- Le déficit public ne doit pas être aggravé.
Pour répondre à ces cinq critères, on favorise surtout le temps partiel choisi, à titre collectif- dans l’entreprise ou l’unité de travail - ou individuel. Si le travail à temps partiel était aussi développé en France (actuellement 15% des salariés) qu’aux Pays-Bas (34%), “on compterait de l’ordre d’un million d’emplois en plus “ d’après Jean-Yves CHAMARD.
Le financement de ce temps partiel choisi serait assuré de trois façons dans un cadre négocié : par l’utilisation des gains de valeur ajoutée liés à la productivité, la réduction des charges sociales, elle-même compensée par la diminution du chômage, et enfin, par la baisse des salaires, proportionnellement inférieure à la réduction du temps de travail.
S’agissant des exonérations de charges sociales, le rapporteur propose de réviser le dispositif institué par l’article 39 de la loi quinquennale sur l’emploi, dans le cas d’une réduction collective du temps de travail. En effet, les responsables d’entreprise ont souvent souligné le niveau trop élevé des exigences imposées par la loi en ce qui concerne la baisse de 15% du volume d’heures travaillées ou les conditions de sortie du dispositif au terme de la troisième année. Aussi, Jean-Yves CHAMARD propose que le montant des exonérations, actuellement fixé à 40% des charges patronales la première année et 30% pour chacune des années suivantes, soit désormais fixé, sans limite de durée, à 30%, répartis entre les charges patronales pour les deux tiers et les charges salariales pour un tiers. Compte tenu de ce que le taux des charges salariales est environ moitié moindre que celui des charges patronales, cela permettrait de réduire de 20% aussi bien les unes que les autres. Les seuils d’application du dispositif porraient être abaissés à 10% de réduction du temps de travail (au lieu de 15% actuellement) et 7% d’embauches supplémentaires en contrepartie (au lieu de 10%). Enfin, il conviendrait d’appliquer ces critères à un niveau plus fin que celui de l’entreprise, l’atelier ou l’unité de travail. Le rapporteur suggère également d’éviter aux salariés optant pour le temps partiel, une perte brutale des droits sociaux ( retraite, indemnité de licenciement, indemnisation chômage) qui ne tiendrait pas compte de l’activité antérieurement pratiquée à temps plein ( à cet égard, on attend toujours la sortie du décret d’application sur la possibilité, ouverte à titre expérimental jusqu’en 1998 par la loi quinquennale, d’un maintien des droits à retraite dans le cas d’un passage volontaire à temps partiel). Le rapporteur souhaite également que soit instituée une obligation de négociation annuelle sur le temps choisi et que, dans les entreprises, le refus d’une demande de temps partiel soit nécessairement motivé. Enfin, la Mission demande que soit organisé un débat au Parlement sur la question du temps de travail et des mesures permettant de lutter contre le chômage.