Cette étude de l'IRES situe la question de l'anticipation et de l'accompagnement des restructurations comme enjeu d'une construction sociale par les acteurs de l'entreprise. Pour développer cette hypothèse, les auteurs proposent une approche comparative des restructurations en Europe, à partir de l'étude de cas d'un groupe industriel multinational dont les réorganisations internes ont été de forte ampleur, le groupe Alsthom. L'approche comparative interroge la façon dont les choix stratégiques opérés par le groupe au niveau central peuvent être modulés par des formes plus locales de gouvernance pour aboutir in fine à des régimes de restructurations spécifiques.
L'enquête montre que la redéfinition de la gouvernance renforce plutôt la prérogative du management sur les décisions de restructurations, avec une forte prégnance de la nouvelle gouvernance du groupe, offrant peu de place aux directions locales et moins encore aux représentants des salariés. On est moins dans le temps de l'anticipation que dans celui de la négociation des conséquences sociales des restructurations. Cependant, l'analyse comparative montre que les modalités et les effets des restructurations subissent la marque de formes plus situées de gouvernance (pauvreté caractérisée du dialogue social en France alors que les représentants du personnel allemand ont obtenu un accord négocié). Dans ce contexte, le comité d'entreprise européen devient une instance associée à la gouvernance. Cependant, il est davantage perçu comme un cadre de compréhension de la stratégie du groupe que comme un espace de co-construction de cette stratégie.